Malgré les procédures judiciaires, le leader de Pastef, Ousmane Sonko, a décidé de maintenir la pression sur le pouvoir en place en appelant ses militants à descendre sur le terrain. Une stratégie politique très risquée, mais qui peut le ramener dans la course, selon Adama Sadio, Docteur en Sciences politiques.
A quelque huit mois de la présidentielle de février 2024, la participation d’Ousmane Sonko est, aujourd’hui, suspendue aux décisions de la Justice. L’avenir politique du principal opposant au régime de Macky Sall est donc sombre.
Mais, d’après Adama Sadio, Docteur en Sciences politiques, le maire de Ziguinchor peut encore être dans la course. « La participation d’Ousmane Sonko à la présidentielle est compliquée, mais n’oublions pas que nous sommes en politique, et qu’en politique, ce sont les rapports de force qui font l’histoire et non parfois le droit », a-t-il notamment fait remarquer, dans un entretien avec Seneweb.
L’analyste politique de rappeler, dans la foulée, que l’ancien président Abdoulaye Wade a été condamné dans l’affaire Me Babacar Sèye et qu’il a par la suite bénéficié d’une amnistie.
Interrogé sur les risques de perte de ses droits civiques, M. Sonko avait clairement déclaré lors d’un entretien avec Walf Tv que « ce n’est pas une parodie de justice qui va décider de (son) éligibilité à la présidentielle de février 2024 ».
Le leader de Pastef qui a tenu à préciser lors de cet entretien qu’il n’est pas un « fugitif », a souligné que « (sa) candidature (il en fait) l’affaire des Sénégalais.
C’est au peuple de décider qui va participer ou pas à l’élection. Si le peuple décide de laisser Macky Sall choisir ceux qui vont participer à l’élection, je m’en remettrai à volonté divine ».
Pour Dr Sadio, expert en gouvernance électorale et démocratique, « la situation actuelle est telle que rien n’est joué, rien n’est perdu, tout dépend de la situation du terrain. En politique, les gens ne s’aiment pas.
Comme le disait un penseur, la politique, c’est une continuité de la guerre sans effusion de sang ». Allant plus loin dans son argumentaire, il souligne que « si Ousmane Sonko parvient à contrer une certaine résistance sur le terrain, et d’ailleurs, il me semble qu’il a très bien compris, s’il le réussit, il pourra bel et bien être candidat en 2024 », rappelant les cas Alassane Ouattara et Alpha Condé, qui ont été écartés de la course pendant plusieurs années avant d’être portés ensuite à la tête de leurs pays respectifs.
Pour ce qui est de la désobéissance civique, l’enseignant-chercheur a indiqué que l’opposant a choisi cette forme de lutte par rapport à ce qu’il considère comme une injustice, des menaces contre son intégrité physique, le fait qu’on barricade son domicile, qu’on attaque son véhicule quand il répond au juge : « L’objectif visé, c’est d’activer l’attention publique sur un fait. Il me semble que cet objectif, il l’a atteint ».
Cependant, notre interlocuteur admet que « l’autre objectif, c’est-à-dire amener son vis-à-vis à apporter des correctifs, afin que ses revendications soient satisfaites, reste à être atteint, si l’on sait que son domicile a été à nouveau barricadé ». A ce titre, il estime que « c’est une stratégie trop risquée dans la mesure où quand on décrète une désobéissance civique, il faut aussi avoir conscience des conséquences ».
L’analyste politique précise d’ailleurs que « c’est la première fois au Sénégal qu’une personne soit jugée devant Chambre criminelle et qu’elle ne répond pas au juge sans aucune excuse valable et pourtant Ousmane Sonko ne fait pas l’objet d’un mandat d’amener. Mais ce n’est, à mon avis, qu’une conséquence logique du pouvoir politique dont il dispose ».