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Après l’annonce faite par le président de la République Macky Sall sur la mobilisation de plus de 100 milliards de francs CFA pour financer la campagne agricole 2023-2024, le Premier Ministre Amadou BA a présidé le jeudi 27 avril 2023, à Dakar, un Conseil interministériel sur la question. Ainsi, des mesures phares ont été prises à l’issue de cette importante rencontre. Comment se porte l’agriculture au Sénégal ? Est-ce que l’horticulture ne peut-elle pas redonner un souffle nouveau au secteur ?

À l’instar de tous les secteurs économiques du pays, l’agriculture souffre depuis des décennies. Les secteurs de l’horticulture et de la riziculture qui sont en pleine phase d’expansion ont aussi leur lot de problèmes. Entre diminution des horaires de travail, rareté de la main d’oeuvre, absence de commerçants et autres acheteurs de la production, les groupements d’intérêt économique ( GIE) du Delta et l’Interprofessionnel Oignon du Sénégal ( IPOS) tirent sur la sonnette d’alarme depuis des années pour ameuter les autorités du Ministère de l‘Agriculture.

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Aya Fall, Agriculteur, Président de l’Union des Groupements d’Intérêt Économique du Delta de Ross Bethio, une organisation regroupant 35 entités avec un potentiel de 700 hectares de terres dont 250 hectares mis en valeur depuis 2015 pour la riziculture et le maraîchage, est revenu sur l’ampleur des dégâts que risquent d’encourir ses pairs si leur situation perdure.  » Dans le delta du Sénégal que je maîtrise, les surfaces emblavées sont estimées à 49 mille hectares avec une production qui tourne autour de 8 tonnes à l’hectare, et les 35 voire les 40% de ce potentiel sont menacés soit 60% des exploitations familiales » estime t- il.

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Au Ministère de l’Agriculture plus précisément à la Direction de l’Horticulture, une croissance sans précédent de la filière fruits et légumes est clamée partout, ce qui explique la mise en place de différentes stratégies pour maintenir son ascension qui constitue une bouffée d’oxygène pour le secteur de l’emploi des jeunes et un créneau sûr pour l’atteinte de l’autosuffisance alimentaire au Sénégal.  » Pour l’année 2019, on a enregistré une production totale de 1 million 624 mille tonnes, répartis entre 275 mille tonnes de fruits et 1 million 349 mille tonnes de légumes. Pour les légumes de grande consommation comme l’oignon on a eu 444 mille 112 tonnes et 156 milles tonnes pour la pomme de terre  » nous renseigne le Directeur, Docteur Macoumba Diouf.

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Titulaire d’un Master 2 en Géographie à l’UCAD depuis 2013, Aya Fall, le fils du terroir est revenu à la terre depuis 2005. En plus des estimations des pertes mentionnées précédemment, il rappelle le potentiel énorme d’absorption du chômage que le Sénégal risque de perdre avec la faillite du secteur rizicole. » Pour les récoltes qui démarrent d’habitude au mois de juillet, on utilise soit les moisonneuses batteuses ou les « Ngobaan », des ouvriers agricoles qui font manuellement la récolte. Ces saisonniers, des milliers de jeunes, gagnent pour chaque hectare 100 à 120 mille francs Cfa. Le riz est vendu sur place à des riziers qui détiennent des unités de transformation. Les moyens utilisés pour transporter le riz des champs aux magasins sont les camions les tracteurs à wagon, les voitures pick-up et les charrettes à cheval » décrit le Président du conseil communal de la jeunesse de Ross Bethio pour détailler avec force les enjeux économiques et les craintes des milliers d’acteurs qui gravitent autour de ce secteur vital.

Des craintes non justifiées si l’on en croit aux assurances du Directeur de l’Horticulture. » On est au courant des problème des producteurs de la Vallée, mieux on a même entrepris différentes initiatives pour les assister. En premier lieu, on a répertorié le volume des stocks en souffrance avec des missions de terrain envoyées au niveau des Centres de Groupage, au niveau des Plateformes de Commercialisation et au niveau des magasins de stockage…Avec l’agence de régulation des marchés ( ARM ), on a un dispositif qui nous fait des rapports hebdomadaires, ainsi pour l’oignon on a 37 mille tonnes en souffrance, 3 mille tonnes pour la pomme de terre, 295 tonnes pour la chou, 833 tonnes pour la carotte  » informe M. Diouf.

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Le transport interurbain, la main d’oeuvre ouvrière, le rayonnement de beaucoup de secteurs gravitent autour de l’agriculture. » Durant la campagne agricole, on emploie des saisonniers qui viennent des autres régions comme la Casamance, le Sine Saloum, le Baol. Ils gagnent entre 60 et 70 mille francs Cfa par mois pendant 5 mois ce qui fait environ des revenus globaux de 300 à 350 mille francs Cfa par saisonnier. Les récoltes sont vendus à des commerçants appelés « Bana Bana » venus divers horizons  » développe encore Aya Fall.

Du côté de l’Agence de régulation des marchés ( ARM), un fond rotatif d’un milliard acquis en collaboration avec la Délégation de l’entrepreneuriat rapide ( DER) et La Banque agricole ( LAB) est déjà débloqué pour cibler des commerçants qui vont acheter les stocks en souffrance.  » Les commerçants ciblés après étude sont au nombre de 14, d’ailleurs 7 d’entre eux ont déjà reçu un montant de 690 millions francs Cfa pour un taux de 6%, ce fond rotatif va leur permettre d’acheter la production durant les prochains 6 mois » nous atteste le Directeur.

L’interprofessionnel Oignon du Sénégal ( IPOS) émet de sérieuses réserves sur cette mesure qui, non seulement est venue en retard mais favorise plus les commerçants que les producteurs du secteur.  » Les commerçants qui viennent avec des prêts vont acheter au prix le plus bas, au lieu des 200 francs Cfa le Kilogramme, ils vont nous acheter la production à 140 francs Cfa le Kilogramme » dénonce Mamadou Diop, président des zones de Dagana et du Lac de Guiers ».  » La meilleure solution pour nous est de vendre directement aux ministères qui en ont besoin sans intermédiaire  » propose Mamadou Diop, président des zones de Dagana et du Lac de Guiers.

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Avec des comptes d’exploitation qui explosent pour passer du simple au double, le trésorier général adjoint de l’IPOS, membre du bureau national et du Conseil d’Administration de cette organisation, est convaincu que les producteurs d’oignons courent vers la ruine assurée.  » Pour la récolte d’un hectare, on payait 100 mille francs maintenant c’est 250 mille francs Cfa à prendre ou à laisser. Celà s’explique par le fait du manque de véhicules qui convoyaient les saisonniers venus des régions de l’intérieur du pays à la place d’une semaine de travail pour finir l’hectare, il nous faut 2 semaines, beaucoup de champs sont laissés intacts faute de main d’oeuvre  » continue t- il.

Au delà des mesures conjoncturelles de l’État, les producteurs agricoles de la Vallée attendent des solutions structurelles pour leur secteur confronté à des défis majeurs tels que le changement climatique et la certification des intrants comme les semences et l’engrais.  » À la place des 25 à 30 tonnes à l’hectare, on a présentement 8 à 10 tonnes, car le froid qui durait 3 mois et qui est propice à la culture de l’oignon, ne cesse de descendre à 20 jours ou dès fois moins ce qui a engendré une baisse de production mémorable. Pour les semences et l’engrais, aucun laboratoire capable de nous assurer la qualité n’est disponible au Sénégal » se désole Mamadou Diop.

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